Moins connus, mais tout aussi essentiels dans l'œuvre de Per Kirkeby et caractéristiques de son approche artistique conceptuelle, sont ses "Blackboard". Entre 1970 et 1987, l’artiste a créé un total de 99 œuvres dans ce matériau spécifique. Sur des panneaux d’isorel recouverts d'une couche de vernis noir, rouge ou vert, mesurant généralement 122 x 122 cm, il utilisait des craies pour faire référence à la nature, dans un style élémentaire.
Néanmoins, le support n'est pas le seul composant éphémère de ces œuvres spécifiques ; la matière se prêtait à une forme d'art qui n'était pas censée durer éternellement puisque l'artiste les effaçait, quelque fois délibérément, ou les repeignait.
Cet acte est parfois devenu lui-même un motif puisque Kirkeby essuyait ses tableaux noirs pour initier un processus de "sédimentation", un concept qu'il a emprunté à la géologie et qu'il a largement exploré dans son travail. C'est précisément dans cette possibilité de l’effacement qu'il exerçait un grand degré de frivolité et de légèreté, inatteignable avec d'autres matières.
D'un point de vue esthétique, ces tableaux noirs sont ainsi très proches d'un collage : "En accumulant des craies de couleurs sur des craies de couleurs ou en empilant des images sur des images, un espace transparent rempli de significations partiellement effacées est apparu’’. Ces superpositions résonnent avec ses peintures, qui se caractérisent également par des couches de peinture cumulées. Et au court des années 1990, lorsque l'artiste a commencé à utiliser d'autres matériaux que la craie, une évolution de ses tableaux noirs s'est matérialisée
En outre, ses tableaux noirs se situent à la lisière de ses pratiques picturales et sculpturales car nombre d'entre eux présentent des similitudes visuelles avec les sculptures en briques que l’artiste a commencé à produire vers 1970. Dans ces sculptures, les spectateurs étaient confrontés à leur vision de l'art et de l'architecture, mais aussi à l'espace environnant et à la nature.
Bien que les lignes de craie aient disparu après avoir été effacées, l'aura ou le rayonnement des images continuera de donner un ton au tableau noir ou, comme l'a dit l'artiste, à "un monde coloré de significations effacées".
Lesser-known, but equally central to Per Kirkeby’s œuvre and characteristic of his conceptual artistic approach, are his so-called ''Blackboards''. In the period between 1970 and 1987, he created a total of 99 works in this specific materiality. On Masonite panels primed with black, red, or green blackboard varnish, usually measuring 122 x 122 cm, the artist used chalk to make references to nature, in an uncomplicated style.
However, the subject matter is not the only ephemeral component of these specific works; the medium lent itself to a form of art that was not supposed to last forever, as the artist sometimes deliberately wiped them out or overpainted them.
Sometimes this act in itself became a motif as Kirkeby wiped his blackboards to initiate a process of "sedimentation," a concept he borrowed from geology and explored extensively in his work. It is precisely to this possibility of simply rubbing out that he attributed the ability to exercise a great degree of frivolity and lightness that he could not achieve in other media.
Aesthetically, these Blackboards are therefore very similar to a collage: “by laying coloured chalk upon coloured chalk or piling picture upon picture a transparent space filled with partially rubbed out meanings has arisen”. This layering, however, does not make the comparison with his paintings, which are equally characterized by piled layers of paint, remote. As the 90s progressed, an evolution of his blackboards into paintings materialized itself as the artist started using other materials next to chalk.
His Blackboards can, furthermore, be situated at the intersection of his painterly and sculptural practices as many of them include visual resemblances to the brick sculptures he started to produce from the 1970s onwards. In these sculptures, viewers were confronted with their view on art and architecture but also with their surrounding space and nature.
Although the chalk lines may have disappeared after wiping them out, the aura or radiation of the images will continue to provide a tone for the Blackboard, or, as the artist called it, ''a coloristic world of rubbed out meanings''.