D’origine Allemande, Martin Carlin (vers 1730-1785) est un ébéniste établi à Paris dans la deuxième partie du XVIIIe siècle. En 1759, il se marie avec l’une des sœurs de l’ébéniste Jean-François Oeben (1721-1763), Marie-Catherine. Après avoir travaillé pour son beau-père, il passe sa maîtrise qu’il obtient en 1766. Il exerce en tant qu’ouvrier libre, au Faubourg Saint-Antoine, à l’enseigne « Saint-Esprit » et « La Colombe ». Par le biais des marchands merciers, il livre de nombreuses commandes à la famille royale, bien qu’il n’obtient jamais le titre d’ébéniste du Roy. Parmi ses clients, notons la reine Marie-Antoinette, la Comtesse de Provence, ainsi que Mesdames, les filles de Louis XV. Il travaille notamment avec les marchands merciers avec Simon-Philippe Poirier et Dominique Daguerre. Par exemple, entre 1766 et 1778, il collabore essentiellement avec Poirier dans le cadre de création de meubles de porcelaine.
Il produit quelques meubles de style Transition et excelle dans la création de meubles de style Louis XVI. Il s’impose comme le maître des ouvrages ornés de la plaque de porcelaine de Sèvres, qu’il commande directement à la manufacture, et dont il fait sa spécialité. Il utilise dans ses créations d’autres matières précieuses, comme les laques de Chines, du Japon et des bronzes finement ciselé et doré. Carlin réalise principalement des petits meubles légers et précieux.
Le milieu du XVIIIe siècle voit le développement du confort dans les intérieurs aristocratiques et bourgeois. En parallèle, le goût pour l’exotisme et l’ailleurs continu de se diffuser. La collation est une nouvelle habitude où l’on déguste des mets sucrés, des douceurs, ainsi que des boissons venues d’Orient. Pour répondre à ce nouveau loisir, une production de meubles légers et pratiques, surnommés « petits meubles » se développent. Ce mobilier se pare de matériaux précieux d’inspiration orientale, comme la laque ou la porcelaine. Ces tables, appréciées pour leur côté pratique et transportable, se sont rapidement répandues dans les foyers de l'élite à partir des années 1760. Cette table de salon est ornée d’une plaque de porcelaine qui supporte la chaleur et qui est idéal pour servir le thé et le café.
Le XVIIIe siècle est marqué par la figure du marchand mercier qui, pour répondre aux souhaits des commanditaires, coordonne la création des pièces de mobilier et fait intervenir les différents artisans. Pour une table à thé de ce type, les artisans de la Manufacture de Sèvres créent et peignent les plaques. Ensuite, un ébéniste réalise les parties en bois destinés à recevoir les plaques de porcelaine. Enfin, divers artisans conçoivent et fabriquent les pièces décoratives en bronze doré. La pièce ouvragée est confiée au marchand mercier assurant la livraison.
Les ateliers de Martin Carlin sont à l’origine de plusieurs petites tables circulaires, en marqueterie de frisage, de « plateaux de chiffonnière » et de bronze finement ciselé et doré, à trois pieds réunis par une tablette d’entretoise. C’est le cas d’une table chiffonnière conservée au musée du Louvre (inv. 1774) ; une petite table de travail (1976.155.104) est conservées au Metropolitan Museum de New York ; une table conservée au Paul Getty Museum (inv. 70.DA.75) ; un guéridon de l’ancienne collection Rothschild (vente Christie’s, New York, 13 octobre 2023, lot 347)