Dans le goût rocaille, notre majestueux lustre en porcelaine blanche de Berlin est composé de vingt et une lumières s’articulant autour d’un fût ajouré de motifs de treillage et guirlandes de fleurs, agrémenté de putti tenant une couronne de laurier et surmonté de deux rangs de feuilles de palmiers et d’un ananas.
Un lustre tout à fait comparable partiellement polychrome par Friedrich Elias Meyer et Pierre Geoffroy, commandé par le roi Frédéric le Grand vers 1765 pour Le Neues Palais, Potsdam-Sansoucci, fut emporté par l’Empereur Guillaume II lors de son exil à Huis Doorn, aux Pays-Bas où il est toujours conservé (reproduit dans l’ouvrage de R.Baarsen, Le Rococo aux Pays- Bas, Rijksmuseum, Amsterdam, 2002, p.81). Il figura en 1913 dans l'appartement privé de l'Impératrice dans le Neue Palais, et probablement à l'origine dans la salle de concert inférieure. Des exemples non signés dans la salle bleue et la salle de chasse sont aujourd'hui encore in situ au Palais Sanssouci.
Une description de tout l’intérieur des deux palais de Sans- Soucis, de Potsdam et de Charlottenbourg par Matthieu Oesterreich, en 1773 mentionnait dans la chambre qui suit la galerie de marbre : « Un lustre de Porcelaine de la Fabrique de Berlin. Le deffein en est élégant & d’une belle proportion. Le luftre eft orné de fleurs et de quelques Figures qui font un bel effet. On peut dire que c’eft le plus beau lustre que l’on ait fait dans ce genre. »
Un autre lustre similaire, aujourd’hui dans la collection privée de SM la Reine d’Angleterre à Sandringham House provenait également de la famille royale allemande, offert par l’Empereur Guillaume Ier.
En 1763, le roi Friedrich II de Prusse acheta à Johann Ernst Gotzkowsky l'usine de porcelaine qu'il avait fondée deux ans plus tôt afin de concurrencer les manufactures de Dresde, Meissen et Sèvres. La manufacture devint : Köningliche Porzellan Manufaktur. La production de la première période friderizianisches Rokoko de KPM peut être considérée comme la plus belle porcelaine rococo produite en Allemagne. Un sceptre de couleur bleu-cobalt, d'abord gravé, en constitue la marque, universellement réputée. Le sceptre fut peint à partir de 1837. Plus tard la marque fut transformée en un sceptre côtoyant un globe royal, avec les initiales KPM. Notre lustre présente un sceptre bleu gravé ce qui permet de dater sa production avant 1837 et plus certainement au début du XIXe siècle.
Dans les factures du portefeuille confidentiel du Roi, sous les acquisitions provenant de la Manufacture de Porcelaine, deux grands lustres de 15 et 21 lumières apparaissent à Noël 1765. Le seul cachet connu sur ces lustres est celui de Pierre Geoffroy, qui dirigea l'atelier des bronzes du KPM et mourut en 1765, ce qui confirme une date probable de création pour le présent modèle. En 1753, le ciseleur Pierre Geoffroy vint de Paris à Potsdam pour travailler à l’atelier de sculpture et de bronzes fondé par Johann Melchior Kambly en 1752. En vue d'encourager la fabrication, la création de nouvelles industries, et dans la perspective d'une production économiquement avantageuse Frédéric II avait accordé la concession à Kambly et aux artisans nécessaires travaillant à Paris dès 1751. Entre 1753 et 1754, Geoffroy, avec le maquettiste Henry-Nicolas Cousinet, le fondateur Dalliel Valy et le doreur Nicolas Morel, ont produit quatre grandes couronnes de bronze composées de dragons pour le Neue Palais, et quatre grands lustres en bronze, également des modèles de Cousinet, pour le Marble Hall du Stadtschloss à Potsdam.
En 1754-1755, Geoffroy dirige la poursuite de l'œuvre de bronze dans la salle de bronze de Stadtschloss à Potsdam, dont le dessin est en partie attribué à Kambly, et à qui l'exécution est entièrement due. Le lustre de couronne produit en 1756 pour la Maison chinoise, témoigne également des excellentes méthodes de travail de Geoffroy.
Les personnages des chérubins sont d'après un modèle de Friedrich Elias Meyer (1723-1785), qui était à la tête de la section fabrication de figurines de la Manufacture Gotzkowsky et qui fut nommé "Directeur des Ornements" de la Manufacture à l'époque de Frédéric le Grand. Dans le livre des modèles KPM, qui a été conservé depuis 1763, les grands lustres avec les deux figures de la renommée sont inscrits sous le numéro de modèle 111 : la Renommée, assis, tenant la trompette basse avec B, et sous le numéro de modèle 173: deux enfants assis sur un étui, ont également été utilisés sur le grand lustre Couronne, l'un avec A, l'autre avec B.
Les paiements fréquents de la bourse royale pour les lustres KPM de la couronne laissent supposer que ces pièces étaient des cadeaux de choix de Frédéric le Grand à d'autres cours.
De tels cadeaux étaient spécialement destinés aux cours ayant des liens relationnels ou politiques, ses frères et sœurs, ses nièces et neveux, mais aussi ses amis, militaires et personnalités politiques importantes. Ces dons étaient destinés non seulement à gagner la faveur personnelle des récipiendaires, mais aussi à montrer les réalisations artistiques de leur propre pays.
Notre lustre est un de ces importants et rares témoignages de l’excellence artistique allemande et des relations diplomatiques et amicales des royautés du XVIIIe et XIXe siècle. Peu de lustres de cette qualité et de cette taille demeurent en mains privées mais nous pouvons citer une pièce très proche de notre luminaire, vendu par Christie’s New York, Collection Suzanne Saperstein,19 avril 2012, lot 70.
In the rocaille taste, our Berlin white porcelain chandelier is composed of twenty-one lights articulated around a pierced shaft of trellis motifs and garlands of flowers, decorated with putti holding a laurel wreath and surmounted by two row of palm leaves and a pineapple.
A quite comparable partially polychrome chandelier by Friedrich Elias Meyer and Pierre Geoffroy, commissioned by King Frederick the Great around 1765 for the Neues Palais, Potsdam-Sansoucci, was carried away by Emperor William II during his exile to Huis Doorn, in the Netherlands, where it is still kept (reproduced in R. Baarsen, Le Rococo in the Netherlands, Rijksmuseum, Amsterdam, 2002, p.81). He appeared in 1913 in the Empress' private apartment in the Neue Palais, and probably originally in the lower Concert Room. Unsigned examples in the Blue Room and the Hunting Room are today still in situ at Palace Sanssouci.
A description of the whole interior of the two palaces of Sans-Soucis, Potsdam and Charlottenburg by Matthieu Oesterreich, in 1773, mentioned in the room which follows the marble gallery: « A porcelain chandelier from the Berlin Factory. The drawing is elegant and of a good proportion. The chandelier is adorned with flowers and some figures that make a beautiful effect. We can say that it is the most beautiful luster that we have done in this genre. »
Another similar chandelier, now in the private collection of HM the Queen of United Kingdom at Sandringham House also came from the German royal family, donated by Emperor William I.
In 1763, King Friedrich II of Prussia bought from Johann Ernst Gotzkowsky the porcelain factory which he had founded two years before, and it became: Köningliche Porzellan Manufaktur. The production from the first period friderizianisches Rokoko of KPM can be considered as the most beautifulRococo porcelain produced in Germany. This chandelier is one of a group produced at the KPM Manufactory in Berlin between 1765 and 1786.
In the King's Privy Purse invoices, under acquisitions from the Porcelain Manufactory, two larges 15 and 21 light chandeliers first appear on Christmas 1765. The only known stamp on such chandeliers is Pierre Geoffroy, who headed the bronze workshop of the KPM and died in 1765, which confirms a probable date of creation for the present model. In 1753, the chaser Pierre Geoffroy came to Potsdam from Paris to be employed in the Factory of Ormolu Works founded by Johann Melchior Kambly in 1752. With a view to encourage manufacturing, the creation of new industries, and with an eye to economically advantageous production of gilt bronze work in his own country, Frederick II had granted the concession to Kambly, and the necessary artisans working in Paris as early as 1751.
Between 1753 and 1754, Geoffroy, together with the model maker Henry-Nicolas Cousinet, the founder Dalliel Valy and the gilder Nicolas Morel, produced four large bronze crowns composed of dragons for the Neue Palais, and four large bronze chandeliers, also from models by Cousinet, for the Marble Hall of the Stadtschloss in Potsdam. In 1754-1755, Geoffroy directed the chasing of the bronze work in the Bronze Hall of Stadtschloss in Potsdam, whose design is partly attributed to Kambly, and to whom the execution is entirely due. The crown chandelier produced in 1756 for the Chinese House, also attests to Geoffroy's excellent working methods.
The figures of Fame and the cherubs are after a model by Friedrich Elias Meyer (1723-1785), who was the head of the figure making section of the Gotzkowsky Manufactory and who was appointed the "Directeur des Ornaments" of the Manufactory at the time of Frederick the Great. In the KPM book of models, which had been kept since 1763, the large crown chandeliers with the two figures of Fame are entered under Model number 111: One Fame, seated, holding the trumpet low drawn with B, and under Model number 173: two seated children on a case, were also used on the large 'Crown chandelier, one with A, one with B.
The frequent payments from the royal purse for the KPM crown chandeliers leads one to assume that such pieces were gifts of choice by Frederick the Great to other courts.
Such presents were especially intended for Courts with relational or political connections, his brothers and sisters, nieces and nephews, but also friends, military and important political personalities. These gifts were intended not only to win the personal favor of recipients, but also to display the artistic accomplishments of one's own country.
Our chandelier is one of those important and rare testimonies of the German artistic excellence and the diplomatic and friendly relations of the royalties during the 18th and 19th century. Few chandeliers of this quality and size remain in private hands but we can quote a piece very close to our chandelier, sold in 2012 by Christie’s New York, Suzanne Saperstein collection, April 19, 2012, lot 70.
Post Lot Text
AN EARLY 19TH CENTURY BERLIN ROYAL MANUFACTURY ORMOLU-MOUNTED WHITE PORCELAIN TWENTY-ONE LIGHT ROCOCO CHANDELIER