La nef est en orfèvrerie allemande une coupe célébratoire dans la tradition des jeux de boisson. La majorité semble avoir été produites à Augsbourg et Nuremberg, les deux plus importants centres d'orfèvrerie de la Renaissance.
Situées géographiquement au cœur de l’Europe, Augsbourg et Nuremberg étaient des grands centres d’échanges commerciaux. Ce bouillonnement économique a permis l’établissement d’une communauté de marchands dont la richesse a attiré des artisans et des artistes venus de toute l’Europe. Cette nouvelle clientèle riche, mais aussi avide de nouveautés, a ainsi stimulé la créativité de ces artisans.
Le XVIe et le XVIIe seront la grande époque des hanaps de formes les plus variées qui deviennent la pièce indispensable des buffets et tables festivales des corporations et des riches familles.
Ansi le navire est un symbole important pour cette bourgeoisie marchande dont la richesse vient largement du commerce maritime ; il est donc en toute logique la forme idéale de hanap et par association le symbole du rôle de son propriétaire dans le commerce moderne et la pensée (F. M. Kammel, éd., Traumschiffe der Renaissance, Munich, 2024, pp. 27-36).
Formé à Zurich, Linden est devenu maître de la guilde de Nuremberg en 1609. Il est à juste titre considéré comme le spécialiste des nefs puisque Tebbe (op. cit.) lui en attribue presque une quinzaine, si l’on exclut celles sur roues. Mesurant entre 22 et 50 cm, Linden varie les combinaisons de décors optant soit pour une coque repoussée de dauphins et vagues ou une coque lisse ciselée d’une frise d’enroulements comme cette nef qui est à rapprocher de celle de la collection Yves Saint Laurent et Pierre Bergé, vendue chez Christie's à Paris, le 25 février 2009, lot 129.
M. Rosenberg, Der Goldschmiede Merkzeichen (Band 3), Frankfurt am Main, 1925, p. 1836, No 4135.
K. Tebbe, Nürnberger Goldschmiedekunst, Band I, Nürnberg, 2007, p. 256, No 527.