Mardi Je vous avais écrit une lettre qui commençait ainsi : « Je n’ai absolument rien à vous dire de neuf, mais je vous écris parce qu’il ne peut pas être que vous m’ayez donné votre adresse et que je n’en ai pas profité ». Lorsque j’ai appris par le canal de ma famille que vous deviez revenir dimanche, j’ai donc vu qu’il était trop tard car c’était au samedi. Cent et un remerciemens d’abord pour votre bon envoi. Je ne trouverai jamais le moyen de vous dire le plaisir que j’ai à voir arriver une lettre de vous, à la décacheter, à la lire, avec la certitude d’y toujours trouver un mot de vraie amitié et une bonne nouvelle. Au milieu de ma sotte vie, quand je lis une lettre de vous, je dois avoir un peu l’air d’un homme empoisonné par la fumée de l’asphalte ou du tabac, qui entrerait tout à coup dans un jardin et qui recevrait dans le nez un coup de vent plein de l’odeur des roses. Ainsi donc elle revient et vous aussi. On va donc pouvoir un peu vivre. Je voudrais pouvoir répondre quelque chose à votre gentil mot sur les apparitions mais les petites tapes de votre très petite main sont si douces à recevoir que je vous avoue qu’elle ne corrigeront jamais guère personne. Quoiqu’il en soit, sachez que votre filleul travaille. Qu’elle était jolie l’autre soir courant dans son jardin avec mes pantoufles et un petit bonnet noir et rouge en laine tricotée ! Je l’ai pourtant senti et c’est vrai. Je ne vaux plus rien, je ne suis plus fou en amour. Et vous ??? Et si on ne l’est plus, qu’est-ce que le reste ? déraisonner en conscience, voilà la grande affaire de la vie. Quand on n’ose plus déraisonner, il faut se brûler la cervelle, ou se marier.
Que pensez-vous des trois vers suivans : « Lorsque ma bien-aimée entrouvre sa paupière, Sombre comme la nuit, pur comme la lumière, Sur l’émail de ses yeux brille un diamant noir »
(Je viens de laisser tomber ma plume et de faire un paté. Le mot endommagé est « comme »).
Je veux beaucoup savoir si vous aimez cela. Je l’ai écrit avec deux bonnes choses, un petit mot de vous & le souvenir de Pa. Je vous préviens qu’on l’a trouvé hardi mais – est-il bien sûr que ce soit un défaut que la hardiesse ?
Question. Pourquoi le souvenir de Pa me revient-il sans cesse en présence de X ? Parlez donc du droit de présence. Autre question. Si Pa en chantant le saule avait l’idée de se retourner un peu de côté (je suis au balcon) et de rendre votre très montmorencique filleul amoureux fou, que signifierait le proverbe des deux lièvres ? Ceci est une question philosophique & providentielle. Troisième question. Ne pourrait-il pas se faire que je me trouvasse entre deux selles………… fi donc ! Dernière question. Pourquoi l’odeur du patchouli me rend-elle mélancolique et celle de l’iris joyeux ? Ceci est un rébus.
Je donne à votre pied gauche une poignée de main. Alfd Mt
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« Tendrement Vôtre » - Lettres et manuscrits autographes d'auteurs français
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Lot 37Sale 19585
Lettre autographe signée à Caroline JaubertMUSSET, Alfred de (1810-1857)Estimate: EUR 700 - 1,000
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