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MIRÓ, Joan (1893-1983), Ilia Zdanevitch, dit ILIAZD (1894-1975) et Adrien de MONLUC (1571-1646). Le Courtisan grotesque. Paris : Le Degré Quarante et Un, 1974.

Exemplaire de tête sur Japon, avec suite des gravures en noir, du dernier livre d'Iliazd. C’est en janvier 1951 qu’Iliazd approche Miró pour participer à son édition d’un « discours ancien, extraordinaire, extravagant, bien fin et fort beau, suffisamment inconnu et publié jadis », en 1621 : le Courtisan grotesque d’Adrien de Monluc. Miró semble immédiatement intéressé, et donne son accord à l’automne 1953. Cependant, sa gestation est plus longue et tumultueuse que ne l’escomptait Iliazd. Après une pause de plusieurs années, il écrit à Miró le 24 octobre 1960 : « je suis combien impatient de faire avec vous le Courtisan grotesque. Je vous attends à Paris et j’espère que nous allons le terminer sans nous séparer cette fois-ci ». La réflexion commune des deux artistes reprend de plus belle, autour de la maquette et notamment du nombre de gravures qui doivent illustrer le livre. Cependant, Miró tarde encore à s’investir : le 4 mai 1961, Iliazd lui écrit, amer : « rendez-vous compte vous-même, cher Miró, est-ce que les émotions humaines ont perdu toute valeur ? Voilà dix ans que j’attends que vous exécutiez vos dix planches selon la maquette que vous avez acceptée et approuvée. Et pendant ces dix ans, toute l’action que j’ai entreprise pour Adrian de Monluc est restée en suspens » Il semble qu’il faille moins comprendre cette lenteur de Miró comme le signe d’un désintérêt de sa part que comme sa réaction à la rigidité du cadre dans lequel Iliazd, le véritable architecte du livre, essaie de le circonscrire. Son dessein est en effet de participer pleinement à la réalisation du livre, et non de simplement l’illustrer, « ce qui est toujours une chose secondaire. Un livre doit avoir toute la dignité d’une sculpture taillée dans le marbre » (Carnets de l’Iliazd Club, p. 57). Les progrès de Miró sont lents, mais réels : dans une lettre du 21 septembre 1965, il écrit à Iliazd : « j’ai beaucoup travaillé au Chevalier, texte magnifique, de grandes ressources pour l’illustrateur. J’ai terminé aujourd’hui une bonne série d’études pour notre personnage. Comme première étape de travail, plus que m’en tenir rigoureusement à l’architecture du livre, il m’a semblé préférable, en tenant compte du texte, de travailler librement, sans aucune contrainte, ce qui m’a permis d’approfondir davantage dans l’âme et caractère de ce chevalier fantasque. La discipline à suivre pour construire le livre viendra ensuite » Iliazd lui remet une nouvelle maquette en juillet 1969. L’éditeur fait fondre les caractères et acquiert une nouvelle machine pour imprimer le livre, et Miró commence à graver les cuivres le 3 juin 1971.
Maintes fois reportée, la signature des bons à tirer a lieu en février 1973. Le résultat est à la hauteur : « les gravures avec leurs personnages coloriés, grotesques, mais gais, font tout à fait écho à ces jeux de mots, à l’esprit de moquerie et de dérision qui sourd de toutes les lignes ; la disposition en vis-à-vis fait aussi écho à la typographie verticale et couchée. Le trait noir, éraillé, tracé au canif, sur de la matière noire, est grinçant comme le texte » (Carnets de l’Iliazd Club, VI, p. 78). Jacques Dupin abonde dans ce sens : « une composition dansante, détournée, contestant, confirmant le texte, et le sublimant à la verticale. Un accord et une contradiction qui ne pouvaient que donner le mouvement le plus vif au lyrisme de Miró. Faillait-il s’incliner devant la discipline du texte ainsi typographié ou délirer à partir des mots, des phrases et des dissonances du texte, d’un autre siècle de surcroît ? Il fallait ne renoncer ni à l’un ni à l’autre. Ce que Miró fit, conduit par une double extravagance, en un dessin gratté, modulé, désinvolte mais, pour chaque personnage, inventé. De la couleur en aplats, en projections, en pulvérisations, conduisant la lumière » (Miró Graveur, IV, p.12). Un énième rebondissement retarde à nouveau la parution du livre, lorsque le tirage des planches rencontre quelques difficultés. Iliazd demande à Miró une nouvelle gravure, pour illustrer la couverture en parchemin dont il souhaite doter le livre. Les exemplaires sont enfin prêts en mai 1975, vingt-cinq ans après les débuts du projet. C’est le dernier ouvrage illustré et mis en lumière par Iliazd, qui s’éteint à Noël de cette même année.
Cramer, Miró, 182 ; Jacques Dupin, Miró graveur, IV, p. 12 ; Françoise Novarina-Raslovleff, « Le Courtisan grotesque. Histoire d’une coopération lente et féconde de deux géants du livre, Iliazd et Joan Miró », dans Carnets de l’Iliazd Club, VI, 2005

In-folio (420 x 295 mm), en feuilles, sous couverture de parchemin illustrée. Tirage total à 110 exemplaires, celui-ci l'un des 6 de tête sur Japon ancien, avec suite des gravures sur Chine, n°2, signé par l'éditeur et l'illustrateur à la justification. 1 pointe sèche originale avec aquatinte de Miró en couleurs, pour la couverture de parchemin, et 15 gravures originales avec aquatinte du même, numérotées dans la plaque. Comme indiqué à la justification, l'exemplaire comprend également une suite complète des 15 gravures, tirées en noir sur Chine. L’ensemble est contenu dans une chemise de papier-fibre. Chemise et étui de l’éditeur en toile écrue.

Deluxe copy on Japan, with a suite in black printed on China paper, of Iliazd's final published book. In total 31 original drypoints and etchings with aquatint by Joan Miró.
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